L'Armérie maritime : une fleur qui "va au charbon"
Armeria maritima (Plumbaginaceae)
L'Amérie maritime ou Gazon d'Olympe (Armeria maritima subp. maritima) pousse en France sur les rochers, les dunes grises et les pelouses soumises aux embruns des côtes de l'Atlantique et de la Manche.
Les feuilles sont étroites, linéaires, formant des rosettes parfois rassemblées en touffes gazonnantes. La floraison d'avril à juin, peut persister jusqu'à l'automne. L'inflorescence globuleuse de 1 à 3 cm, entourée de bractées scarieuses, est au sommet d'une hampe de 5 à 30 cm et rassemble des fleurs pentamères rose plus ou moins foncé.
Un article de la revue Espèce de 2014, sous la plume de G Lemoine et M Pauwels, débute par ce paradoxe :
"Le changement global que nous connaissons actuellement représente généralement une menace pour la biodiversité. Nous nous attendons en effet à ce que les modifications de l’environnement associées aux activités humaines fragilisent les espèces végétales et animales et menacent leur survie à plus ou moins long terme. Cependant, rarement, les perturbations environnementales peuvent aussi favoriser l’apparition de nouvelles espèces ou sous-espèces et participer à l’enrichissement local de la biodiversité."
Les sols dits "calaminaires" de la région Nord-Pas de Calais correspondent à d'anciens sites de stockage de déchets ou à des zones de retombées de particules issus des usines de productions métallurgiques du bassin houiller. La concentration de ces sols en métaux lourd y est supérieure d'un facteur 10 pour le cadmium et jusqu'à un facteur 100 ou 1000 pour le zinc et le plomb par rapport à un sol "normal". La toxicité qui en découle y est bien souvent trop forte pour la survie des espèces locales.
Pourtant, au lieu du désert attendu, le milieu offre des ilots de végétation sur lesquels se succèdent d'abondantes floraisons. C'est ici et nulle part ailleurs que fleurit Armeria martima subp. halleri en compagnie de trois autres espèces, dites "métallophytes", sur certaines parcelles très polluées : les pelouses calaminaires du Nord-Pas de Calais.
A la suite d'études génétiques qui restent à étoffer, cette "Armérie calaminaire" n'apparaitrait pas comme une espèce à part entière mais bien comme une sous espèce de l'Armérie maritime rencontrée sur les liserés côtiers. Il est alors question d'une implantation secondaire des populations "géographiquement proches" d'Armérie maritime au départ des falaises et rochers des côtes nord de la France en direction de ces sols pollués.
Cette plante, en capacité de résister à un stress environnemental tel que les embruns salés, le vent, le froid et la sècheresse, pourrait retrouver des conditions compatibles à son implantation du fait de la pollution du sol par les métaux ?
http://www.tela-botanica.org/bdtfx-nn-6546-description
Schauer T, Caspari C. Guide Delachaux des plantes par la couleur. Editions Delachaux et Niestlé. p252
Lemoine G, Pauwels M. La pollution créatrice de biodiversité. Les gazons maudits du Nord-Pas de Calais. Espèces juin 2014 ; n°12
La Capselle bourse à pasteur.
Capsella bursa-pastoris (Brassicaceae)
La Capselle bourse-à-pasteur est une plante très répandue de 20 à 50 cm de hauteur. La tige est simple ou ramifiée. Les feuilles de la base, fortement divisées, à la façon des Pissenlits, sont réunies en rosette. Les jeunes rosettes de feuilles récoltées en hiver ou en début de saison peuvent être dégustées en salades. Les feuilles de la rosette souvent fanent et jaunissent avec le developpement de la tige florale. Des feuilles moins découpées, embrassantes poussent le long de la tige.
La Capselle fleurit de mars à décembre. Ses fleurs sont petites, blanches, regroupées en grappe. La corolle comporte 4 pétales, blancs, libres à l'extrémité arrondie, deux fois plus longs que les 4 sépales ovales de couleur verte. On dénombre 6 étamines dont 2 plus courtes. Le pistil est surmonté d'un seul style assez court.
Fleurs et fruits cohabitent sur la tige, fleurs en haut et fruits en bas. Les fruits sont petits, aplatis en forme de coeur ou de bourse, observables toute l’année.
Le nom de la plante, Capsella, la petite boite en latin, fait référence à ses fruits, évoquant le sac ou la bourse de bergers, par la forme, ou l'aspect plat et vide.
Une confusion est possible avec une espèce voisine Capsella rubella dont les sépales sont teintées de rouge et les bords du fruit sont concaves.
L'usage populaire attribue des vertues hémostatiques à l'infusion ou aux extraits fluides obtenus à partir des parties aériennes de la Capselle.
Saignement de nez, plaies superficielles, pour l'usage local ; règles abondantes voire hémorragies uterines en substitution des dérivés de l'ergot de seigle pour la voie générale. Ces propriétés médicinales doivent elles être attribuées à la plante elle même ou à son parasite fréquent : une rouille blanche (Albugo candica) recouvrant d'un dépot blanchâtre et déformant les tiges en saison humide (printemps et automne) ?
Seule persiste aujourd'hui, au niveau de l'European Medicines Agency, une indication pour la réduction des règles abondantes après examen et exclusion d'une étiologie sérieuse par un clinicien : voie orale, parties aériennes séchées, en infusion ou extraits fluides.
Quoi de plus anodin et passif qu’une petite graine ? Une petite graine rangée dans une petite boite en forme de cœur !
Une étude, menée dans les années 70, a montré que les graines de la Capselle, entourées d’une enveloppe mucilagineuse, sont capables en laboratoire d’attirer, de fixer, de tuer puis de dégrader par une enzyme (protéase) des larves de moustiques. Plus proche du milieu naturel d’une graine de Capselle, la même séquence se déroule pour des microorganismes tels que bactéries, nématodes ou protozoaires.
Un travail préalable avait montré la faculté des graines à assimiler des acides aminés utilisés pour la croissance de la plantule.
La séquence précédente de l’attraction à la dégradation d’une proie apparaissait alors comme le préalable logique à une assimilation par la graine des produits de digestion de microorganismes.
Quelle est la part réelle de ces mécanismes en milieu naturel pour une graine, organe de réserve censé assurer de façon quasi autonome le développement de la plantule ?
Les graines de la Capselle sont elles « carnivores » ?
http://www.tela-botanica.org/bdtfx-nn-75016-description
Couplan F. Salades sauvages. Editions : Sang de la terre.
Spohn R et M. Fleurs et insectes. Editions Delachaux et niestlé. p119-120
http://www.ema.europa.eu/docs/en_GB/document_library/Herbal_-_Community_herbal_monograph/2011/01/WC500100946.pdf
http://www.ema.europa.eu/docs/en_GB/document_library/Herbal_-_HMPC_assessment_report/2011/01/WC500100944.pdf
Barber JT. Carnivorous plant newsletter 1978 ; 7 : 39-42.
Pollution catastrophe.
Notre vie a été rendue possible par une gigantesque pollution, pollution par la prolifération massive des organismes douées de photosynthèse :
"L'univers que nous habitons est le fruit d'une catastrophe de pollution, que l'on appelle alternativement grande oxydation, holocauste de l'oxygène, ou catastrophe de l'oxygène ...
Le développement des premiers organismes capables de photosynthèse - les cyanobactéries - et le flux d'hydrogène provenant de la surface de la terre ont provoqué l'accumulation d'oxygène ... Avec le développement et la diffusion des plantes vasculaires, l'atmosphère s'est stabilisée ... La présence massive d'oxygène a entrainé l'extinction de nombreux organismes anaérobies qui peuplaient terre et mer, au profit de formes de vie aérobies."
Extrait de : Emanuele Coccia ; La vie de plantes. Une métaphysique du mélange. Editeur : Bibliothèque Rivages.
Autre lien : https://www.franceinter.fr/emissions/l-heure-bleue/l-heure-bleue-03-janvier-2017
"L'origine de notre monde"
Quand un élève de lycée horticole devient maître de conférence en philosophie :
"L'origine de notre monde n'est pas dans un évènement, infiniment distant dans le temps et l'espace, à des millions d'années-lumière de nous - elle ne se trouve pas plus dans un espace dont nous n'avons plus aucune trace. Elle est ici, maintenant. L'origine du monde est saisonnière, rythmique, caduque comme tout ce qui existe. Ni substance ni fondement, elle n'est pas plus dans le sol que dans le ciel ; mais à mi distance entre l'un et l'autre. Notre origine n'est pas en nous - in interiore homine -, mais en dehors, en plein air. Elle n'est pas quelque chose de stable ou d'ancestral, un astre aux dimensions démeusurées, un dieu, un titan. Elle n'est pas unique. L'origine de notre monde ce sont les feuilles : fragiles, vulnérables et pourtant capables de revenir et revivre après avoir traverser la mauvaise saison."
Emanuele Coccia.
Extrait de : Emanuele Coccia ; La vie de plantes. Une métaphysique du mélange. Editeur : Bibliothèque Rivages.
Deux liens sur deux émissions de France culture pour retrouver l'auteur à l'occasion de la parution de son livre :
https://www.franceculture.fr/emissions/les-discussions-du-soir/sinspirer-de-la-plante
La Ficaire
Ficaria verna (Ranunculaceae)
La Ficaire fleurit de fin février à avril alors que les feuilles des arbres sont encore en bourgeons.
Cette année elle était en fleur mi février dans le vignoble bordelais alors que qulelques rares fleurs apparaissent en ce moment, soit un mois plus tard, en Alsace dans les sous bois des étangs d'Ingersheim.
La fleur de 2 à 3 cm de diamètre comprend trois sépales verts, de 6 à 12 pétales jaune vif, elliptiques et étroits avec une fossette nectarifère à la base, de nombreuses étamines et un pistil comportant de nombreux carpelles libres.
Les petites feuilles luisantes, en forme de cœur dans le prolongement d’un pétiole de longueur variable ne sont visibles qu’en hiver et au printemps. En été, seules persistent de la plante les racines enfouies dans le sol. A la fin de la floraison lorsque les feuilles sont encore visibles, de petits renflements apparaissent à l’aisselle de certains pétioles. Ces tous petits bulbes qui se détacheront lorsque les feuilles faneront, assureront la multiplication végétative de la plante.
Le nom Ficaire vient du latin ficus, la figue en latin, évocation des racines renflées de la plante. Les racines participent à un cycle végétatif original pour nos régions : l’existence exclusive de feuilles en hiver et au printemps.
En été, les feuilles disparaissent, la plante entre en dormance après son activité hivernale et printanière. Il ne subsiste que des racines, des racines épaisses « renflées » chargées de réserves d’amidon grâce à la photosynthèse du soleil printanier sur les feuilles. A l’automne, la baisse de température réveille le bourgeon de la tige souterraine. Apparaissent des racines fines, absorbantes, puis les premières feuilles à l’entrée de l’hiver. Pendant l’hiver la plante puisera dans les réserves en sucre de ses racines « renflées » pour développer ses feuilles.
Toujours ces racines renflées … par la « théorie des signatures », du fait de leur ressemblance avec les hémorroïdes, elles sont utilisées pour la production de crèmes indiquées pour l’amélioration de la circulation veineuse.
R Thomas, D Busti et M Maillart. La Ficaire, une fausse renoncule. http://biologie.ens-lyon.fr/ressources/Biodiversite/Documents/la-plante-du-mois/la-ficaire-une-fausse-renoncule
Lenne C. Dans la peau d'une plante. Éditions Belin. p 177
Botineau M. Botanique systématique et appliquée des plantes à fleurs. Editions Tech et Doc Lavoisier.
Le travail acharné
Ci dessous un texte d'une actualité étonnante, une sorte de petite thérapie en quelques lignes, extrait d'une oeuvre "classique" ...
"Et vous aussi pour qui la vie est un travail et une agitation échevelée : n'êtes vous pas fatigués de la vie ? N'êtes vous pas mûrs pour le prêche de la mort ?
Vous tous qui aimez le travail acharné et tout ce qui va vite, tout ce qui est neuf et inconnu, -- vous vous supportez mal, votre assiduité n'est que malédiction et volonté de vous oublier vous-mêmes.
Si vous croyiez davantage à la vie, vous vous donneriez moins à l'instant. Mais pour attendre vous n'avez pas suffisamment de contenu -- et vous n'en avez pas même assez pour la simple paresse !"
Nietzsche.
Extrait de : Ainsi parlait Zarathoustra. Traduction de G.A. Goldschmidt. Le Livre de Poche.
Très belle alliance musicale du classique (R Strauss ; Also sprach Zarathustra) et du métal (Led Zeppelin ; Stairway to heaven) sur ce lien : https://www.youtube.com/watch?v=0TZvR62jwik
La Corydale creuse et la Corydale solide.
La famille des Papaveraceae est la famille du Pavot, du Coquelicot, de la Chelidoine. L'ancienne famille des Fumariaceae (Fumeterres, Corydales) a été fondue dans celle des Papaveraceae par la magie de la biologie moléculaire !
Comme l'Anemone des bois, nos deux Corydales signent l'arrivée du printemps et se dépèchent de fleurir les sous bois avant la pousse des feuilles des arbres.
Corydalis cava (Papaveraceae)
La Corydale creuse est vivace par un bulbe creux. Elle fleurit souvent abondamment au printemps dans les sous bois de l'Est. La tige de 10 à 30 cm porte des grappes de fleurs éperonnées de 2 cm de couleur violette à blanche. L'éperon est long, courbé, arrondi à l'extrémité. Les bractées sont ovales et entière. Les feuilles sont segmentées.
Corydalis solida (Papaveraceae)
La Corydale solide est fréquente dans les sous bois d'une grande partie de la France. Les feuilles sont composées. Elle est vivace comme la Corydale creuse mais par un bulbe qui reste plein. Les feuilles présentent des division plus étroites. Elle fleurit également en grappe au début du printemps. Les dimensions des tiges et fleurs sont voisines de celles de la Corydale creuse mais, chez la Corydale solide, les bractées à l'aisselle des fleurs sont découpées. L'éperon de la fleur est peu arqué à l'extrémité.
Pendant les trois semaines de floraison, les Corydales peuvent être "attaquées" par le Bourdon terrestre. Le bourdon viendra mordre le bout de l'éperon pour prélever le nectar de la fleur. L'ouverture ainsi pratiquée pourra ensuite être exploitée par d'autres insectes. La plante est ainsi pillée sans être pollinisée faute d'un passage de l'insecte par l'ouverture naturelle de la fleur.
Les graines des corydales possèdent une excroissance charnue (appelée élaïosome) riche en lipides et protéines et très prisée des fourmis pour nourrir leurs larves. Les fourmis transportent alors les graines à distance de la plante mère, parfois les perdent en route, sinon les acheminent dans leur fourmilière. Après la consomation de cette excroissance par les larves, les graines sont rejetées hors du nid ou stockées dans une zone de déchets de la fourmilière, riche en excrément, favorisant sa germination.
Cette relation mutualiste entre la plante et la fourmi, dans laquelle l'apport de nouriture aux fourmis est favorable à la dispersion et la germination des graines, est appelée myrméchorie.
Les bulbes des Corydales contiennent un alcaloïde isoquinoléique, la corydaline, potentiellement toxique par une activité antiacetylcholinesterasique.
http://canope.ac-besancon.fr/flore/nom_com/corydales.htm
http://www.tela-botanica.org/bdtfx-nn-75067-synthese
http://www.tela-botanica.org/bdtfx-nn-75068-synthese
Spohn R et M. Fleurs et insectes. Editions Delachaux et niestlé. p52-55
Hye youg Ji et Al. In vitro metabolism of corydaline in human liver microsomes and hepatocytes using liquid chromatography-ion trap mass spectrometry. Journal of separation science 2012 ; 35 : 1102-1109
La Scille d'automne
Scilla autumnalis ou Prospero autumnale (Asparagaceae)
La scille d'automne pousse dans les pelouses sèches et rocailleuses, du centre de la France, du grand ouest et de l'Alsace.
La plante de petite taille (10-25 cm) peut passer inaperçue sur la lande des côtes du Finistère sud parmi les herbes et les ajoncs nains.
Elle est vivace par une gros bulbe, la tige est grêle, les feuilles sont absentes à la floraison, puis allongées, étroites, lisses et linéaires, en gouttière.
La floraison s'étale de août à octobre, les fleurs de 5 à 6 mm sont bleu lilas, groupées en une grappe allongée, les anthères noirâtres sont bien visibles. La pollinisation est assurée par les insectes.
http://www.tela-botanica.org/bdtfx-nn-53323-synthese
Pointe du Van (29) ; 12.08.2015
Pointe du Van (29) ; 12.08.2015
Menez dregan, Plouhinec (29) ; 15.08.2015
Pointe du Van (29) ; 06.08.2015
Spergulaire des rochers
Spergularia rupicola (Caryophyllaceae)
Cette plante basse, de 10 à 30 cm de long, s'enracine dans les anfractuosités puis s'étale et tapisse localement les rochers et les falaises du bord de mer, le long de la Manche et de l'Atlantique. Elle est vivace, pubescente ; les feuilles sont charnues étroites et acuminées.
Elle fleurit en été, les fleurs sont roses avec des pétales et des sépales de même longueur, l'androcée est constituée de 10 étamines.
http://www.tela-botanica.org/bdtfx-nn-65675-synthese
Pointe du Raz, le 12.08.2015
"Tel savant qui prétend en savoir quelque chose"
Extrait de : L'ecclésiaste. Un temps pour tout. Chap. XX ; (Traduction de E. Renan) Éditions Arlea.